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CONFERENCE DU 20 MAI 2000 A L'OCCASION DE LA FETE DE LA FAMILLE

LA PLACE DE L'ENFANT APRES LA RUPTURE

Bonjour!
Je me présente: Myrose MASSEAUX-CAILLET, médiateur familial.

En tant que médiateur familial, il va sans dire que la place de l'enfant après la rupture me préoccupe beaucoup. Vous aussi sans doute.

Si la médiation familiale dont j'ai fait mon métier est un processus de résolution des conflits familiaux, dans lequel le médiateur familial a pour objectif principal d'aider les adultes en désunion à trouver eux-mêmes les bases d'un accord durable et mutuellement acceptable, en tenant compte des besoins de chacun des membres de la famille, il est certain que ce sont surtout les besoins des enfants qui sont particulièrement pris en compte dans les entretiens.

Quelle est la place de l'enfant dans cette situation de crise ?

J'ai envie de répondre: c'est la place qu'il ne doit jamais quitter, celle qui doit être toujours la sienne, au milieu de ses deux parents, entourée des deux, sûr de pouvoir toujours aimer les deux, d'être aimé des deux, de pouvoir toujours compter sur eux, car ils restent et resteront toujours ses parents quoiqu'il arrive, desquels on ne se sépare pas, desquels on ne divorce pas !

Mais ce n'est pas si simple !

Le rôle du médiateur familial est de faire comprendre cela aux parents, mais ce n'est pas gagné d'avance, même si ce n'est pas mission impossible, car ces parents là sont en pleine souffrance personnelle, et à cette souffrance s'ajoutent de la rancune, de la colère, de la haine, voire de la vengeance.

Tous ces sentiments les envahissent, les aveuglent et les rendent sourds aux angoisses de leurs enfants qu'ils ne voient plus, qu'ils n'entendent même plus.
Doit-on le leur reprocher ? Non bien sûr !

Ils ont eux aussi besoin d'aide, besoin d'être accompagnés pour rester des parents responsables.

Il s'agit de leur dire, d'essayer de leur faire admettre qu'ils doivent mettre "en veilleuse", "en sourdine", leur propre souffrance pour être à l'écoute de la grande détresse de leurs enfants, qui, en plus de leurs propres angoisses doivent aussi gérer celles de leurs parents !
La charge est lourde, trop lourde.

L'enfant, au milieu de parents déchirés, est un enfant à qui on "vole son enfance". Il faut impérativement lui redonner sa place dans le monde qui lui appartient, ce monde magique de l'enfance où tout est beau, dont on garde de merveilleux souvenirs, ce monde qui lui sert de tremplin pour devenir un adulte responsable demain, un nouveau parent capable d'assumer à son tour ses obligations familiales.

Il ne faut pas voler l'enfance à l'enfant, si on ne veut pas lui casser sa "colonne vertébrale mentale". C'est mon leitmotiv.

Donc, autant que faire se peut, essayons de construire, ou de reconstruire un parental bien cimenté par un respect mutuel, un respect surtout à l'égard de cet enfant qui n'est pas un objet, qui n'est pas une monnaie d'échange, qui ne doit pas faire l'objet de chantage, qui ne doit pas être manipulé, lorsqu'il n'est pas "acheté" parfois.

Aucun de ses deux parents ne doit être dévalorisé à ses yeux. Le "conjugal" est mort, c'est le passé. Mais le "parental", c'est le présent et l'avenir. L'avenir, c'est par l'enfant qu'il passe, aussi, ce dernier doit être la principale préoccupation de ses parents.

Un projet de vie pour l'enfant doit être élaboré par les deux parents dans une étroite collaboration, une confiance réciproque. Mais cette collaboration ne peut avoir lieu sans un minimum de communication. Cela me paraît indispensable et c'est à cela que je travaille au quotidien.

Que les parents continuent à communiquer entre eux après la rupture, dans l'intérêt de leurs enfants.

Des parents séparés peuvent être, et sont de très bons parents, j'en ai rencontré. Tout comme j'ai rencontré en médiation des enfants à qui j'explique la situation et qui me disent: "chouette, j'aurai deux maisons, deux chambres, deux vélos etc.…". Et je leur réponds: "bien sûr, tu seras aussi bien chez toi chez maman que chez toi chez papa, c'est formidable !"

S'ils ont bien compris la situation, si tout leur a été correctement présenté, en toute transparence, si la vérité a été dite sans tricheries, les enfants peuvent comprendre ce qui est, et sera désormais, sans en vouloir à quiconque.
Je leur demande souvent d'être indulgents à l'égard des adultes qui ne se conduisent pas toujours comme il le faut.
Ces enfants me font souvent des réflexions qui me laissent perplexe, sur le manque de lucidité des adultes que nous sommes !

Les enfants de la rupture ne sont pas forcément des enfants traumatisés, sauf lorsque les situations conflictuelles sont telles, hélas trop souvent, qu'il est nécessaire de rechercher un soutien médical et même psychologique.

Je ne néglige pas cet aspect, car j'exerce mon métier en toute humilité, consciente de mes limites, aussi, je n'hésite pas une seconde, à passer le relais à d'autres professionnels spécialisés lorsque le cas le nécessite.
Je ne crois pas à la personne polyvalente, capable de tout faire. Chacun a des compétences dans son domaine d'intervention.

Pour ma part, je fais en conscience ce que je sais faire, à savoir, apporter mon aide aux parents qui me sollicitent, en écoutant leurs angoisses et leurs craintes de ne pouvoir rendre leurs enfants heureux. Je les aide à faire le deuil de leur "conjugal" qui les fait souffrir, et je contribue avec mes moyens à leur reconstruction personnelle, comme individu, car souvent dans les couples qui se séparent, chacun ne vivait et n'existait qu'à travers cette entité duale qu'est le couple, et lorsque ce couple explose, c'est le vide, la panique, les deux membres n'ont plus d'identité, plus de personnalité.

C'est un travail de patience et de longue haleine pour remettre debout et digne une personne qui voit son monde s'écrouler, par la faute de l'autre, croit-il, qu'il rend responsable de la rupture.
On ne peut imaginer, quand on n'a pas vécu soi-même un tel bouleversement, les conséquences dramatiques, parfois à vie, d'une mauvaise rupture mal ou pas du tout préparée.

Il ne m'appartient pas de réparer les dégâts lorsque des personnes me consultent. Si je dresse un bilan, c'est pour extraire du passif, , tout élément positif, si insignifiant puisse-t-il être, qui va me permettre de sortir de l'impasse dans laquelle se trouvent ces victimes.
Car pour moi, je ne pense pas que dans ce genre de situation, il y a un bourreau et une victime, hormis les cas de violences habituelles et répétées, il n'y a que des victimes, pas seulement les deux membres du couple, mais aussi et surtout d'innocentes victimes qu'on a tendance à oublier, et pour lesquelles les traumatismes peuvent être irréversibles; Je veux parler, vous l'avez compris, des enfants. C'est la raison pour laquelle je les reçois également sans la présence des parents.
Ce qui me facilite la tâche, c'est que je peux compter sur la collaboration de ceux-ci qui aiment leurs enfants et qui feront ce qu'il faut pour les sauver, même si le prix à payer est fort, très très fort.
C'est au prix de l'abnégation, malgré les sentiments de colère et de vengeance qui nous animent et qui pousseraient plutôt à sanctionner, à détruire l'autre. Pas facile de se défaire des fusils que l'on a dans la tête pour ne plus penser qu'à l'intérêt des enfants.

C'est également au prix de valoriser ou revaloriser l'autre qui nous a fait si mal, au yeux des enfants. Cet autre là, devenu l'ennemi de la pire espèce est un parent et doit le rester au même titre que nous.

Nos enfants ont besoin de leurs deux parents pour s'épanouir le plus naturellement possible, comme tous les enfants. Pour se construire à leur tour, ils ont besoin de modèles, de repères, d'exemples. Qui mieux que leurs parents peuvent l'être ? Est-il nécessaire de leur "faire payer" ce que nous considérons comme un échec ?

Personnellement, je ne considère pas toujours une séparation comme un échec, du reste je n'aime pas parler d'échecs ni d'erreurs. Je préfère les termes d'étapes, d'apprentissages que nous avons, tout au long de notre vie, et par lesquelles nous apprenons, nous grandissons, nous nous enrichissons.

Oui, la souffrance peut être un formidable levier pour nous réaliser, nous dépasser, pour découvrir en nous des ressources insoupçonnées.

Dans tous les cas, il n'y a pas lieu d'entraîner nos enfants dans cette escalade de souffrance qui ne peut que les "casser"; Il faut absolument éviter cela, car ne perdons pas de vue que nous sommes parents et que nous le restons à vie.

S'il nous arrivait de l'oublier, nos enfants, au moment opportun, nous le rappelleront à juste titre, ils ne manqueront pas de le faire, et je veux vous dire que le jugement qu'ils porteront sur nous, sera implacable.
Il n'y a pas pires juges que nos enfants qui sont impitoyables.

Cela m'inciterait à dire que nous n'avons pas droit à l'erreur. Pourtant, je suis moi aussi parent et j'ai du sûrement commettre des maladresses, de bonne foi, en pensant faire bien, dans l'intérêt de mes enfants.

Nos actes sont guidés, à mon sens, par nos émotions et nos besoins, nous sommes des êtres humains faits d'émotions et de besoins; quoi de plus naturel que de vouloir les satisfaire ?

Mais lorsqu'on est parent, il faut parfois réguler nos propres émotions, limiter nos besoins pour prioriser ceux de nos enfants.

Nous ne serons jamais des parents parfaits bien que ce soit la principale exigence de nos enfants. Ils veulent des parents idéaux, d'où la nécessité pour nous de leur dire nos faiblesses, non pas pour nous justifier à leurs yeux, mais pour les rassurer, les sécuriser, les assurer de notre amour, de notre bonne volonté à essayer de les rendre heureux malgré la rupture à laquelle ils assistent démunis, impuissants. Ils aimeraient tant nous aider !
Ils se culpabilisent même de ne pas pouvoir le faire, ce qui ajoute encore à leur souffrance.

Nous nous devons d'être des parents les moins maladroits possibles, dans notre propre intérêt mais surtout dans celui des enfants. Je suis convaincue que l'intérêt de nos chers petits est la chose qui compte le plus.

La grande question est: comment être un bon parent lorsqu'on a mal, lorsqu'on se désintéresse de tout, lorsqu'on a perdu confiance en nous, en la possibilité de rester debout, malgré tout, lorsqu'on ne sait plus s'ouvrir sur les autres, lorsqu'on ne sait plus voir que de la rupture qui nous a si souvent brisés, il reste ce merveilleux cadeau du ciel que sont nos enfants pour lesquels nous donnerions si facilement notre vie ?

Là, après une rupture, si douloureuse soit-elle, il ne nous est pas demandé tant !
Nous devons seulement poursuivre l'œuvre que nous avions ensemble entreprise dans l'amour, un amour exprimé autrement à cause de la séparation, mais un amour quand même, fait de complicité avec l'autre qui n'est plus conjoint ou compagnon mais qui est le deuxième parent dont les enfants ont besoin pour leur équilibre.

Nos enfants nous en sauront gré plus tard et nous en remercieront. Ce sera notre meilleure et plus belle revanche sur cette souffrance d'aujourd'hui.
Ces sacrifices, je demande aux parents de les faire, pour le bien-être présent et futur de leurs enfants.

Toutefois, je ne voudrais pas à terminer mon intervention sans avoir lancé un message en direction des parents que vous êtes pour vous dire: ne restez pas seuls avec vos problèmes, vos angoisses.. Il y a aujourd'hui des lieux d'accueil pour vous écouter, vous aider à surmonter les obstacles et à résoudre vos difficultés de parents, oh combien nombreuses ! Il y a pour cela des associations familiales dont l'une d'elles a déjà fait ses preuves , je veux nommer l'AMAFAR qui œuvre tous les jours pour le bien-être des familles quelle que soit leur composition.
Cette association met à votre disposition des personnes ressources qui peuvent conseiller et apporter un soutien psychologique, avec du personnel formé à l'écoute, au conseil conjugal, un médiateur familial, un juriste, tout un éventail de compétences dans la relation d'aide, l'accompagnement et même le suivi.

N'hésitez pas à faire appel à ces personnes qui se rendront disponibles, conscientes que votre intérêt, celui des enfants sont également les leurs.

Je vous remercie de votre attention.